046-La restauration du diaporama "Le Cercle"

du Groupe des cinq

La restauration du Cercle

Un montage simple, sans fioritures, bourré d’émotions :

Il apparaissait nécessaire dans le cadre de la sauvegarde des diaporamas de sauvegarder ceux qui ont fait la base de l’histoire du diaporama et qui ont marqué à ce point les diaporamistes que certains disent que c’est grâce à ces diaporamas qu’ils ont été entraîné dans l’engrenage.

Le Cercle fait partie de ces diaporamas mythiques. Réalisé en 1969, il a été second de la Coup d’Europe derrière un montage réalisé par un certain Jacques Denis et un certain Jean Bourguedieu intitulé « Les Amants de Cassiopée ».

Le Cercle est un chef d’œuvre. Il nous fait réfléchir sur l’homme sur ses croyances, et quand on le visualise, on s’aperçoit que sa force est dans sa simplicité. 45 photos, 8’47’’ Des photos simples, une vieille classe d’école, des ronds dans l’eau, des champs, une vieille charrue des mains, des fleurs, une petite fille blonde, une ronde d’enfants… Rien que les choses de la vie quotidienne. Et tout ça prend sa force par sa simplicité. Cette simplicité quotidienne qui nous fait pénétrer une des questions fondamentales de l’homme : Monsieur ! Monsieur ! qu’est-ce que c’est que l’éternité ? Le traitement des images tout en douceur est voulue. Les sandwich des images de l’école, ces images qui correspondent au souvenir qui apparaît comme un rêve comportaient toutes un filtre calque pour atténuer la dureté.

Ce montage m’apparaissait donc, avec celui de « Liberté » un montage indispensable à conserver. Il montre que les effets les plus simples, les images les plus banales peuvent donner une force terrible à un message fondamental. Ici l’émotion est primordiale.

La restauration du « Cercle » : de la patience, encore de la patience, toujours de la patience !

Je ne connais pas d’autre façon d’entrevoir ce genre de restauration. Ce montage, j’avais dû le voir une fois. Il faut dire que l’Atelier Interclub Diaporama fondé par Jean Bourguedieu, avec la bénédiction de Jacques Ramadier, avait la chance d’avoir en la personne de son fondateur le premier collectionneur de France de diaporamas.

Les collections de diaporamas argentiques :

Jean, en effet, s’est fait une spécialité de la duplication. Il possède plus de quatre-vingt diaporamas sans compter les nombreuses duplications qu’il avait fait pour les auteurs. Eh oui ! cela peut paraître extraordinaire mais ce n’est pas l’arrivée du numérique qui a fait réfléchir à la duplication ou la sauvegarde. Non ! il existe plusieurs collections de diaporamas en France et à l’étranger. Je citerai la collection de la Fédération photographique de France, celle de la Fédération International d’art photographique, la collection du Festival d’Epinal, celle d’Objectif image et enfin de celle de Jean Bourguedieu. Il ne faut pas imaginer que toutes ces collections sont identiques. Les deux premières correspondent à des diaporamas ayant remporté des grands prix dans les festivals. Les autres sont plus subjectives.

On peut donc retrouver certains diaporamas à plusieurs exemplaires, sans compter les nombreuses copies d’auteur. La poste n’étant pas toujours fiable les auteurs préféraient en général expédier les copies de leur diaporama dans les galas ou les festivals.

La numérisation des diaporamas :

Mais lorsque j’ai commencé les numérisations de diaporamas, je me suis aperçue que la numérisation, encore plus que les duplications de diapositives, mettait en évidence tous les défauts des images. Il y a les anneaux de Newton qui ont pu être reproduits par des duplications, il y a les rayures, les grains des verres antinewton, le voile déposé sur les verres de ces caches et surtout les poussières.

De ce constat apparaît une évidence, il est souhaitable de travailler sur l’original, de le décadrer pour le scanner, de le dépoussiérer.

Mais il n’est pas facile de savoir si on travaille sur l’original. Il se trouve que les montages de Jacques Ramadier et les duplis se trouvent actuellement chez Jean Bourguedieu avec l’accord de Jean-Sébastien Ramadier. Mais Jean et Jacques étaient à ce point complices que Jean avait fait de nombreux duplis pour Jacques.

Une première numérisation basse résolution pour garder l’image initiale du diaporama :

Lorsque Jean m’a donné « l’original » de Jacques, j’ai commencé à faire un dupli basse résolution des photos sous cache verre sans les décadrer. Bonne précaution afin d’éviter de se demander dans quel sens se trouvait la photo originale. En effet, la manipulation de la pellicule peut entraîner un changement de sens. Et là où il n’y a rien d’écrit, où il n’y a pas de repaire pour trouver le sens, il est bien difficile de rétablir le sens initial.

L’état des images argentiques :

Donc une fois ce scan fait, j’ai commencé à décadrer la première photo qui était le titre. Je la scanne à la résolution maxi de mon vieux scanner soit 3375X2250 et je défini mon outil de recadrage à 3000X2000 en 300 dpi. Je travaille toujours dans cette configuration, ce qui me permet d’intervenir sur des détails qui ne peuvent se voir que sur grand écran.

Et là horreur !!! Non seulement la diapo avait viré, non seulement c’était un nid à poussières incrustées - même une soufflette, même un jet plus fort ne pouvait les enlever - mais en plus, une partie de la gélatine était bouffée. Lorsque je réglais l’éclairage, je perdais par plaques des lignes du cahier de l’image titre.

J’ai tant bien que mal fait ce scan, mais j’ai immédiatement pris le téléphone et j’ai appelé Jean Bourguedieu pour lui demander son dupli. Je pensais peut être que cette version était mieux conservée. À la limite je préférais enlever quelques poussières photographiées en plus mais avoir des images moins détériorées en profondeur.

Et là surprise ! Ce que Jean pensais être le dupli était plus original que l’original. Je m’explique. La version de Jacques Ramadier n’avait pas de sandwich. Celle de Jean avait plusieurs sandwichs incluant des dias sur ex ou des calques. Et cette version était mieux conservée. Mon cahier de la première image conservait ses lignes. J’en fus particulièrement soulagée.

Il est vrai qu’un montage qui a été un montage culte, créé en 1969 et qui selon le témoignage de Jean a tourné de très nombreuses fois a souffert énormément.

Le traitement de l’éclairage et de la couleur :

Il y a d’abord le traitement. Apparemment les images n’étaient pas toutes des Kodachrome. C’étaient donc soit des ekta soit des agfa qui malheureusement n’étaient pas développées par des laboratoires professionnels. En 1969, Montpellier ne possédait pas de laboratoire de développement professionnel. Ainsi donc ces diapos qui ont 36 ans ont viré dans le temps avec des dominantes cyan et une tendance à la monochromie. Il a donc fallu que je restitue des couleurs qui avaient disparu. Voir un bras virant au cyan s’élever dans le ciel n’avait rien de réjouissant.

D’autre part les caches ont permis d’abriter une partie de la diapositive qui alors avait viré au magenta. Le plus souvent la solution a été de recadrer l’image en éliminant cette bande magenta. Il était trop dur de traiter 90 % de l’image pour une dominante cyan et 10 % de l’image pour une dominante magenta et d’harmoniser le tout.

Le traitement de ces couleurs s’est fait évidemment dans photoshop avec des calques de réglage de manière à pouvoir revenir sur ces réglage en fin de course pour harmoniser l’ensemble. En effet utiliser les réglages directs ne permet plus une fois l’image enregistrée de corriger ces réglages.

D’autre part, l’utilisation de ces calques me permet de faire des retouches par masque. Un des défauts de ces diapositives anciennes est un trop grand contraste. En revenant avec le pinceau sur un calque de réglage pour masquer certains parties, j’arrive à diminuer ces contrastes. Beaucoup d’images avaient un éclairage déséquilibré. Les fenêtres faisaient qu’il y avait beaucoup plus de clarté d’un côté que de l’autre. Une fois réglé au sombre ma prévisualisation dans le scanner, j’éclaircissait à l’aide d’un calque de réglage niveau, puis avec l’outil dégradé je traçais une horizontale du sombre vers le clair et je créais autant de calques niveaux que nécessaire pour harmoniser la photo. Et ainsi de suite.

Le dépoussiérage :

Une fois que j’ai recadré et réglé la luminosité, le contraste et les dominantes par calques, j’entame alors la restauration de la photo elle-même. Je dois donc agir sur la photo de base et non sur les calques, tout en gardant ces calques. Et là j’utilise tous les outils qui sont mis à ma disposition pour faire disparaître la poussière. C’est le travail le plus fastidieux, le plus long qui use les nerfs.

Il y a d’abord le filtre antipoussière, outil assez compliqué à mettre en œuvre. Je sélectionne l’image d’arrière plan. Je vais dans filtre, puis « bruit », puis « antipoussière », je règle « le rayon », puis « le seuil » de manière à ce que la plus grosse poussière disparaisse. Ensuite je vais dans « historique », je clique sur le carré à gauche indiquant le filtre antipoussière, un « pinceau historique » apparaît dans ce carré. Ensuite je remonte dans l’historique à l’étape précédente que je sélectionne. Je vérifie que l’image d’arrière plan est sélectionnée si non je la sélectionne, je prends le « pinceau historique ». Dans « mode », je sélectionne « éclaircir » et j’agrandis l’image jusqu’à 300 %.

Et je commence le travail. Dans cette configuration, je peux utiliser « le pinceau historique » qui introduit le filtre antipoussière ou je peux utiliser le « tampon », la « pièce » ou « l’outil correcteur ». Cela dépend de ce que j’ai à corriger.

Si la poussière est énorme, le filtre antipoussière laisse un aplat, dans ce cas, il est préférable d’utiliser le tampon ou la pièce. Le tampon est en général défini avec des contours flous. Des contours nets laissent des traces sur les ciels. Ils sont utiles lorsque l’on corrige des détails. Je n’utilise les contours nets que dans cette configuration. La pièce est intéressante dans des grands espaces relativement uniformes (ciels) là elle fait gagner un temps énorme. Mais attention dès que l’on est dans un ciel en touchant une masse sombre, elle va générer une auréole sombre et là c’est la cata. Il est donc préférable à ce moment là d’utiliser le tampon.

Ce travail est long, très long, trrrrrèèèèssssssss trrrrrèèèèssssssss long. Il faut énormément de patience. Et je pense que je ne connais pas encore toutes les subtilités de photoshop.

Une fois terminé. Je peux lui donner un petit coup de netteté mais avec beaucoup de parcimonie. Puis j’enregistre en psd et en tif puisque psd est un format propriétaire. Je lui donne un numéro en général comme ceci : « 01_cercle », correspondant au numéro de la dia. Je pourrais donc avoir « 22-24_cercle », lorsqu’il s’agira d’une image qui recevra l’apparition de l’image « 23_cercle ». Si nécessaire parce il y a du grain dans les coins sombres, je pas le montage à « neat image ». Le format Tiff est lu par ce logiciel mais il le transforme en Jpeg parce que j’ai la version gratuite.

Les dernières touches :

J’ai donc en fin de parcours un certain nombre d’images qui pèsent lourds, plus de 20 Mo suivant le nombre de calques. Je les regarde dans l’explorateur et j’essaye de les harmoniser ce qui veut dire que je peux reprendre chaque image en modifiant les calques surtout couleur ou parfois saturation. Mais me direz-vous, pourquoi n’avoir pas décidé d’appliquer telle référence de calque couleur et niveaux… Bien évidemment, en théorie ce serait l’idéal, mais dans ce genre de restauration, il se trouve que ces diaporamas sont fait d’images numériques provenant de plusieurs émulsions développées dans des labos non professionnels à des époques différentes. Donc ce sont des éléments qui ont une grande influence dans la variabilité de l’évolution de l’image argentique dans le temps. Et donc cette théorie n’est pas applicable dans ce cas précis.

Donc on fait ça « à l’œil » et suivant sa sensibilité.

Les sandwichs :

D’autre part je précise que dans le cas des sandwich, je traite chaque couche de sandwich séparément avant de les coller dans une même image et de faire varier l’opacité du calque. Pourquoi ? Tout simplement parce que chaque couche comprend également une couche de poussière et d’autre part que le scan ne réagit pas forcément comme la lumière d’un projecteur sur un sandwich.

Les apparitions :

L’image qui doit apparaître puis disparaître doit être traitée différemment qu’en argentique. En effet on intervenait sur le fondu en arrêtant la course à l’endroit voulu pour une belle apparition. Or le logiciel PictureToExe ne connaît pas l’arrêt du fondu. Ce défaut est rapidement compensé par un travail dans Photoshop en incluant la photo traitée en apparition dans la photo qui supporte cette apparition. Une fois le copie/coller réalisé on interviens sur l’opacité du calque par rapport à l’effet voulu.

Plus difficile est la superposition d’images telle que celle de la petite fille dans le ciel noir et la petite fille dans le ciel bleu en salopette. Non seulement la précédente était un sandwich mais en plus un dupli. Qui dit dupli dit léger agrandissement par rapport à l’image initiale, donc à la superposition des deux images. Dans ce cas là je prends l’image précédente, celle de l’apparition de la fillette dans le ciel. J’ouvre ensuite l’image de la fillette au ciel bleu. J’aplatis les calques, je fais une sélection, je fais un copie. Ensuite je ferme sans enregistrer l’image au ciel bleu. De cette manière, les calques sont conservés. Je vais dans l’image de la fillette dans le ciel, je clique sur le dernier calque en haut pour le sélectionner puis je fais un « coller ». Je commence par régler l’opacité des calques .Il faut pouvoir voir la superposition des deux images. Il faut ensuite agir avec la fonction « transformation/torsion » jusqu’à obtenir la superposition la plus exacte possible des deux images. Mais tout n’est pas parfait bien évidemment. Une fois cette transformation faite, je restitue l’opacité du calque et j’« enregistre sous », la première image. Pour cela je masque l’œil de la deuxième. Ensuite je masque l’œil de la première et j’« enregistre sous » la deuxième image. Attention ! dans cette manœuvre, il arrive parfois que le copie/coller de la deuxième image se trouve juste sur l’image d’arrière-plan et donc soit corrigée par les calques correcteurs de l’image d’arrière-plan. Il faut donc faire remonter ce calque au-dessus des calques de réglage de l’image d’arrière-plan.

C’est plus compliqué à expliquer qu’à faire.

Donc une fois tout ce travail fait. J’ai un dossier contenant toutes les images du diaporama en 3000X2000 et 300 dpi. Je crée un dossier que je baptise cercle 1024X683. J’ouvre une image 3000X2000 du cercle avec Irfanview, Je vais à Conversion et renommage par lot. Je sélectionne toutes les images que je veux traiter et les fait passer dans la fenêtre de gauche. Ensuite je vais à droite en bas Je clique conversion par lots, je vais dans parcourir pour indiquer le chemin des images vers mon dossier cercle 1024X683. Je sélectionne Jpeg, je vais dans option je ne compresse pas du tout ou à 95 si les images sont lourdes. Dans « options avancées, je clique « préserve aspect ratio » et j’indique dans hauteur : « 683 ». Le reste ne m’intéresse pas. S’il y a une très légère différence dans la taille des images, elle sera plus perceptible au spectateur dans les bandes horizontales que dans les bandes latérales, d’où le choix de donner la prépondérance à la hauteur.

Enfin une fois ces indications cochées, je retourne dans la fenêtre de gauche pour cliquer dans démarrer. Les images sont alors converties en moins de temps qu’il a fallu pour l’écrire.

J’ai donc dans mon dossier les images du diaporama prêtes à figurer dans Pte.

Le son :

Là j’avoue un peu ma faiblesse. A Maurice d’expliquer son traitement.

J’enregistre le son soit à partir d’une cassette, soit à partir d’une bande. Si c’est 4 pistes aucun problème. Si c’est deux pistes, tout dépend si la bande était vierge au départ. Sinon, je vais chez mon ami Jean qui me la transfère sur une cassette.

Je conserve les topages. Mes préférés ED 3000 P de chez simda. Un vrai régal. Oh ! pas pour l’oreille, mais j’entends les changements de diapos, les fondus monter, les fondus descendre, les fondus monter et descendre pour les apparitions. Je peux donc être très fidèle à l’original.

Je fais deux sortes de bandes. La bande son proprement dite. Celle qui sera le support du montage et la bande son avec en mono droit cette bande et mono gauche le topage. Je vérifie que les deux bandes démarrent exactement au même endroit.

J’exécute le montage avec la seconde bande, en indiquant l’emplacement de chaque dia par rapport non seulement au changement d’image, mais également à la montée du fondu, parce qu’on pouvait changer l’image bien avant que le fondu ne démarre. Et là je pousse ma petite ligne fondue jusqu’à la fin du fondu sonore et ainsi de suite. Avec la visualisation de la bande son c’est idéal. Bien évidemment je ne suis pas servile et je tiens compte que les fondus numériques ne réagissent pas forcément comme les fondus argentiques et là je fais ça avec ma sensibilité. J’essaye d’être le plus fidèle possible à la pensée de l’auteur. La visualisation de la bande son est une aide énorme. Le fait de pouvoir déplacer un bloc d’images également. En effet, la bande son avec les topages n’est pas traitée. La bande son stéréo l’est. De ce fait elle perd parfois quelques centièmes de secondes voire quelque secondes. Et donc il faut rattraper cette perte. On peut alors se caler sur les effets spécifiques du montage pour rétablir le bon topage.

 

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